COMPTE RENDU DE LA REUNION D'INFORMATION SUR LA FRATRIE DANS LA MUCOVISCIDOSE

Nos hotes :
- Dr. Pierre CANOUI, pédopsychiatre attaché à l'hôpital Necker-Enfants Malades
- Béatrice THOUVENIN, psychologue attaché à l'hôpital Necker-Enfants Malades
- Dr. Isabelle SERMET, traitant les enfants muco attaché à l'hôpital Necker-Enfants Malades
- Marie Madeleine GAUTHER, surveillante générale attaché à l'hôpital Necker-Enfants Malades
- Christiane KOUHAIZ, surveillante des soins attaché à l'hôpital Necker-Enfants Malades

Du Centre de Formation au Traitement à Domicile de l'Enfant (CFTDE) :
- Marlène CLAIRICIA
-Anne MONNIER

LE CONCEPT :

L'accès à ces réunions est totalement libre et gratuite. Les parents présents (une quinzaine de personnes ce jour là) venaient de toute la France. Les thèmes abordés sont proposés par les parents puis organisés par le CFTDE sous la direction du Dr. Sermet. La séance se fait sous forme de débat et d'échanges entre les professionnels et les parents. Il n'y a aucun lien avec les associations.

Je souhaite personnellement que vous nous rejoignez nombreux, pour enrichir toujours plus l'échange par votre présence. Je remercie au passage Dr. Sermet, Dr. Canouï, Béatrice Thouvenin, le CFTDE et les autres professionnels présents pour leur accueil, leur écoute bienveillante, la qualité des interventions et l'organisation impeccable de cette nouvelle journée.

LE THEME du 26 janvier 2002 :

- LES OUBLIES DE LA MALADE : LA FRATRIE (FRERES ET SŒURS) ET LES GRANDS PARENTS
- LES REPRESENTATIONS PSHYCHOLOGIQUES DE LA MALADIE CHEZ L'ENFANT MALADE.

LES ACTEURS DANS LA MALADIE :

La fratrie subit très tôt, les soins et l'attention parentale donnée à l'enfant malade ainsi que l'envahissement de son espace physique par une armée de machines et de tuyaux. Petits ils se sentent isolés voir abandonnés par leurs parents, plus grands ils peuvent culpabiliser et se rendre responsables de cette injustice génétique qui ne les touche pas.

Les grands-parents peuvent soit, ne pas comprendre la maladie, soit la refuser ou encore culpabiliser énormément : la caractéristique génétique de la maladie, amène une notion nouvelle : la notion de transgénérationnel. (cf. texte du Dr. Canouï). Ce concept nouveau précipite les grands parents, directement dans la maladie de leurs petits enfants et peut leur faire ressentir une vive " culpabilité rétroactive ".

La famille élargie (oncles, tantes, cousins….) n'apporte pas toujours la compréhension souhaitée. Elle peut ou non procéder au test de dépistage pour leurs propres enfants. L'interaction entre ces différents acteurs est évidente et importante. Qui n'a pas avalé, la petite phrase blessante ou le commentaire qui en dit long sur la compréhension et l'acceptation de la maladie de son enfant.

Recentrons maintenant l'exposé sur la fratrie et les grands parents.

LE CONSTAT CHEZ LA FRATRIE

Les quelques travaux scientifiques sur le sujet et les commentaires des intéressés en présence du psy mettent en évidence chez la fratrie les phénomènes suivants :
- Doute par rapport à eux mêmes,
- Manque de confiance en eux ,
- Inhibition ou timidité,
- Démonstration de colère ou au contraire impression de fragilité, ·
- Plaintes somatiques répétées,
- Angoisse de mort sur leur(s) frère(s) ou sœur(s) atteint(s), ·
- Difficulté à parler d'eux même,
- Sentiment d'abandon, ·
- Petits ils envient l'autre, plus grands ce sentiment se transforme en culpabilité ou en responsabilité.

Chez les petits non malades, c'est la ronde des bobos et des rendez-vous chez le docteur pour faire comme l'autre et ramener ainsi l'attention parental sur eux.

Mais plus que le sentiment d'être moins aimé, ils ont le sentiment d'être moins considéré ! Qu'ils passent par le langage du corps ou qu'ils soient clairement dits, ces phénomènes expriment un mal-être de la fratrie, leur souffrance de " vivre l'autre enfant malade ", la difficulté de trouver leur place dans l'espace de la maison, dans la cellule familiale, à l'école, parfois la difficulté de se donner une justification à leur propre existence…

Le psy nous dit :

> N'hésitons pas à utiliser très tôt le mot " mucoviscidose " pour éviter l'assimilation de cette maladie avec d'autres (rhino, toux ….).

> Soyons vigilants sur l'état psychologique de nos enfants non malades et attentifs à tout changement du comportement et du caractère de l'enfant,

> Respectons leur choix :
- vis à vis de leur frère ou sœur malade(s), quelque soit leur degré de détachement,
- pas d'embrigadement forcé des frères et sœurs dans la bataille contre la maladie,

> Encourageons la socialisation et les visites qui apportent de la vie extérieure dans la maison afin d'éviter de transformer le domicile en sanctuaire de la thérapie et de replier la famille sur elle même.

L'âge de 7 ans semble marquer une étape importante chez l'enfant avec la prise de conscience de l'existence du monde extérieur et le début de la socialisation. L'enfant ressent aussi les difficultés psychologiques des parents qui peuvent avoir un grand retentissement sur son état. Ajoutés aux difficultés citées précédemment l'enfant peut alors s'exprimer par une violence verbale ou physique ou par une déprime passagère.

Les signes de la dépression chez l'enfant ne sont pas évidentes et font l'objet de recherches très récentes :

Chez l'enfant : tristesse - renfermé - pas d'envie - colère - cris - râleur - vie au ralenti - troubles du sommeil - manque d'appétit

Chez l'adulte : tristesse - renfermé - pas d'envie - - problème de mémoire - vie au ralenti - fatigue nerveuse malgré des périodes de détente

La maladie amène heureusement aussi pour la fratrie des éléments
positifs :
·maturité plus rapide - Cohésion familiale renforcée -· Sentiment d'appartenance fort

LES CONSTAT CHEZ LES GRANDS PARENTS

Au coté des grands parents compréhensifs et actifs, certains grands parents ont des difficultés à accepter la réalité de la maladie ; pour ces personnes, la visualisation de la maladie n'est pas toujours évidente, notamment chez
le tout petit ; la ronde quotidienne des kinés est vécue plus comme une persécution que comme une prévention de l'aggravation de la maladie.

D'autres grands parents culpabilisent énormément et sont en situation de deuil . Le caractère transgénérationnel de la maladie établit en effet sa traçabilité dramatique.

Quelqu'en soit la représentation, déni, incompréhension ou culpabilité, les parents disent trop souvent la ressentir négativement. De plus cette situation peut réactiver des conflits familiaux anciens.

Le psy nous dit :

Il faut que par un biais ou un autre, les grands parents expriment leur incompréhension ou évacuent leur souffrance. La personne la plus indiquée est une personne extérieure à la famille.

Au coté des psychologues et des psychiatres, il existe des associations comme VLM (Vaincre La Mucoviscidose) et SOS Mucoviscidose qui proposent des réunions d'information et de discussion exclusivement réservées aux grands parents. L'échange semble être extrêmement bénéfique pour tous (comme l'échange entre parents d'enfants malades d'ailleurs).

LA REPRESENTATION DE LA MALADIE chez l'enfant malade :

Nous savons nous parents que notre enfant malade, objet de tous nos soins et de toutes nos attentions rejette régulièrement le carcan du traitement . Ce qu'on réalise moins, c'est qu'il peut également souffrir de la souffrance psychologique de ses frères et sœurs et parents. Il vit mal l'invasion de son espace physique par des appareils médicaux, des piqûres et des tuyaux nécessaires à un traitement lourd: L'analyse des dessins d'enfants est à cet égard stupéfiant.

L'isolement de ses homologues malades tend à le renforcer dans l'idée qu'il est seul au monde.

Enfin les questions sur la mort viennent plus ou moins tôt, en fonction des événements.

Dans le dessin, les petits enfants représentent la mort sous son aspect physique et concrète ( personnage immobile, allongé).

En grandissant cette représentation devient plus abstraite, plus symbolique voire religieuse (tête de mort, couleur noire, paradis).

Les stratégies adaptatives de l'enfant face à sa maladie peuvent être : · C'est ma faute, · C'est la faute des parents, · Régression psychologique de l'enfant ( aidée notamment par un assistanat maternel fort), · Projection d'agressivité, · Identification à l'agresseur ( ma fille joue avec ses poupées et leur fait des piqûres, la kiné… ).

Le psy nous dit : ·
- Encourageons le dessin chez l'enfant comme un révélateur de son état émotionnel,
- Répondons aux questions des enfants ou n'hésitons pas à y revenir ultérieurement si nous nous sentons pris au dépourvu, ·-
N'associons pas dans notre discours mucoviscidose et mort, ·
- Positivons et encourageons très tôt la participation de l'enfant dans son traitement, ·
- Ayons recours à un psy dans les périodes difficiles ou lors de changement important du comportement de l'enfant.

CONCLUSION

La visualisation psychologique de la maladie respectivement pour le malade, les parents, les grands parents et la famille au sens large est très importante : Elle peut contribuer à rapprocher ses membres ou au contraire à distendre les liens familiaux, être la source de conflit. Il faut avoir à l'esprit que les symptômes de " déviance " du comportement, notamment chez l'enfant sont le fruit de cette visualisation.

Nous sommes, nous parents et grands parents, vecteurs de communication pour nos enfants, malades ou non. Ils doivent, au travers des échanges avec nous, trouver leur place respective dans la famille, à l'école, dans leur milieu social… La présence de la maladie ne doit ni isoler la famille, ni diminuer les échanges avec l'extérieur (famille élargie, amis, copains..).

Les psy-chologues, psy- chiatres et autres psy sont là pour aider ponctuellement à franchir ces difficultés de l'être et assurer un développement le plus harmonieux possible de nos enfants. Ils sont nos passeurs sur des rivières infranchissables…

Pour ma part je reste persuadée que le mental et tout aussi important que le physique et qu'il est un allié de première importance dans la bataille contre la maladie. La satisfaction d'être ensemble lors de cette journée nous fait ressentir que nous ne sommes plus seuls. La vision toujours la vision………..

Isabelle Maman d'un enfant muco de 5 ans
Si vous souhaitez me contacter,
izab@free.fr

Il existe un pédopsychiatre, un psychiatre ou un psychologue rattaché à votre centre de traitement.

Vous pouvez aussi choisir un professionnel près de chez vous :

Psychiatre : médecin ayant fait des études de psy. Il peut prescrire des médicaments pour soulager ou aider la thérapie. Le pédopsychiatre est spécialisé dans les enfants.

Psychologue : diplômé de l'université en psychologie . Il ne peut prescrire des médicaments. Leur expérience peut les amener à se spécialiser dans le domaine de l'enfance.

Un grand Merci à Isabelle, de la part de toute la mucoproduction….