I . Rappel médical
La mucoviscidose est la maladie
génétique grave la plus fréquente en Europe.
Le nombre de naissances concernées par cette maladie
est estimé, en France, à 1/3 500 et le nombre de patients vivants atteints
de mucoviscidose entre 5000 et 6000.
Il s'agit d'une maladie de transmission autosomique
récessive, liée à une anomalie génétique.
Le diagnostic se fait généralement
dans les premières années par un test de la sueur.
Mais le caractère peu spécifique des manifestations cliniques (digestives
et surtout respiratoires) et l'existence de formes à révélation plus tardive
peuvent conduire à faire le diagnostic à un âge plus avancé.
Il s'agit d'une maladie évolutive
pour laquelle il n'existe pas de thérapeutique curative aujourd'hui, même
si des recherches se font dans différentes directions ( thérapie génique,
approches pharmacologiques).
Le traitement reste donc symptomatique et vise à intervenir
le plus précocement possible par une prise en charge multidisciplinaire
comportant, en plus des soins médicaux, une kinésithérapie particulièrement
importante et un suivi nutritionnel.
La majorité de ces traitements se fait
à domicile. Cette prise en charge multidisciplinaire
a permis depuis plusieurs années une nette amélioration de la durée de vie
des malades conduisant la majorité d'entre eux à l'âge adulte.
II. La mise en place d'une
organisation structurée des soins, définie au plan national est rendue nécessaire
par la généralisation du dépistage néonatal et doit permettre d'améliorer
encore la durée de vie des patients et leur qualité de vie.
Le dépistage néonatal de la mucoviscidose
est aujourd'hui possible en même temps que les autres dépistages néonatals
déjà réalisés (hypothyroïdie, phénylcétonurie, hyperplasie des surrénales
et drépanocytose).
Il a donc été décidé de généraliser
ce dépistage déjà pratiqué dans certaines régions à l'ensemble du territoire
national de façon progressive dans les 3 ans à venir, à compter du début
de l'année 2002.
Des équipes pédiatriques à l'expérience reconnue doivent
parallèlement pouvoir accueillir sans délai, les familles frappées par un
diagnostic lourd, alors même que l'état clinique de l'enfant est encore
satisfaisant, et mettre en place, le plus précocement possible, les protocoles
de traitement et de suivi nécessaires.
Même si les comparaisons sont toujours difficiles entre
pays ayant des systèmes de soins différents, la médiane de survie dans les
autres pays occidentaux apparaît supérieure à ce qu'elle est en France (
29,6 ans en 1999), en particulier au Danemark (45 ans). Or, on constate
que, dans ces pays, le suivi des patients est réalisé depuis plus de 10
ans sous la responsabilité d'un nombre réduit de centres qui regroupent
des compétences multiples, un plateau d'explorations adaptées et une grande
expérience clinique.
Avec des files actives de patients par centre (définies
par le nombre de patients vus dans le centre au moins 4 fois par an -et
dans certains pays une fois par mois-) supérieures à 50 voire à 100, le
regroupement des moyens humains et matériels ainsi que l'expérience des
professionnels permet d'obtenir une prise en charge optimale des patients.
C'est pourquoi, il devient indispensable,
parallèlement à l'établissement de protocoles standardisés de repenser l'organisation
de la prise en charge des patients en tenant compte de ces informations.
III. Une organisation des
soins structurée en réseau avec la participation du patient et de sa famille
sous la responsabilité d'un centre de ressources et de compétences de la
mucoviscidose (CRCM), situé en milieu hospitalier.
La mucoviscidose est une maladie
évolutive qui va entraîner nécessairement des conséquences physiques, psychologiques,
scolaires et sociales retentissant sur le patient mais également sur sa
famille.
La diversité des organes concernés
( poumons et sphère ORL, tube digestif, foie et voies biliaires, pancréas
exocrine et endocrine, organes reproducteurs...) implique une approche à
la fois globale et multi-professionnelle dans des champs de spécialités
différents.
La participation de la famille et du patient comme
dans toute pathologie chronique est essentielle pour que le traitement toujours
lourd et contraignant soit suivi de façon optimale :
prises de médicaments pluri-quotidiennes,
séances de kinésithérapie respiratoire,
séances d'aérosols,
recommandations alimentaires….
La prise en charge du patient peut également nécessiter,
à un moment de l'évolution, des soins d'une relative technicité (antibiothérapie
séquentielle par voie intraveineuse sur cathéter central à chambre sous
cutanée, nutrition entérale, oxygénothérapie) qui peuvent le plus
souvent se faire à domicile ou dans un lieu de soins à proximité du domicile
( centre relais ).
C'est pourquoi, la coordination des
soins, de l'hôpital jusqu'au domicile et autour du domicile, est un point
essentiel de l'organisation générale de la prise en charge.
Les décisions stratégiques qui conduisent à ces soins
doivent être prises par une équipe pluridisciplinaire qui connaît bien le
patient et sa famille ainsi que leur capacité à assumer ces traitements
et qui, par son savoir faire, sera à même de prendre les meilleures décisions
thérapeutiques.
Il s'agit de mettre en place et de formaliser un réseau
de prise en charge avec la participation du patient et de sa famille, pour
optimiser l'ensemble des moyens qui peuvent contribuer à offrir à ces patients
le meilleur rapport qualité des soins- qualité de vie.
A) Définition d'un centre de ressources
et de compétences de la mucoviscidose (CRCM)
Il s'agit d'un regroupement des compétences de nombreux
corps professionnels dans les différentes disciplines concernées par la
mucoviscidose pour soigner au mieux dans la continuité et dans la globalité
les patients atteints de cette maladie : ·
- Pour les enfants dépistés, il s'agit du lieu où le
diagnostic est confirmé puis annoncé et où le patient sera régulièrement
suivi.
- Pour tous les patients, il s'agit du lieu où les choix
thérapeutiques et les décisions importantes sont pris et expliqués au patient
et à sa famille. ·
- Pour tous les intervenants et soignants, quels que
soient les lieux de réalisation des soins, il s'agit du lieu de coordination
des soins.
Pour permettre ce suivi et cette coordination
et pour détecter les signes cliniques précoces des nouveaux dépistés, le
patient doit y être suivi au moins 4 fois par an (définition de la " file
active " : nombre de patients suivis au moins quatre fois par an dans le
centre).
Pour pouvoir faire état d'un
bon savoir-faire, la " file active "a été fixée à cinquante patients minimum
par centre.
Toutefois, certains centres pédiatriques, qui suivent
actuellement entre 30 et 50 patients peuvent être retenus dans une période
transitoire de 5 ans à partir de la mise en place du dépistage dans leur
région.
A terme, ce dépistage et le regroupement des files actives
de certains services actuels doivent leur permettre d'atteindre les 50 patients
suivis, dans ce délai.
Enfin, compte tenu de l'histoire naturelle de la maladie,
il est possible de retenir aujourd'hui des centres adultes individualisés
à partir de 20 patients qui seront nécessairement appelés à se développer
dans l'avenir.
B) Rôle d'un centre de ressources
et de compétences de la mucoviscidose
Le CRCM doit s'engager à assumer les fonctions suivantes
: ·
- La confirmation et l'explication du diagnostic pour
les nouveaux dépistés. Il est l'interlocuteur de l'association régionale
de dépistage (ARDPHE) et s'engage, pour chaque enfant qui lui est adressé,
à remplir les obligations liées au programme de dépistage. Si le patient
est perdu de vue ou suivi par un autre CRCM, il s'engage à en avertir l'ARDPHE.
·
- La responsabilité de la définition de la stratégie
thérapeutique et d'une partie des soins. A ce titre, il s'engage à mettre
en œuvre les recommandations nationales validées, en les adaptant à chaque
patient et famille. Il s'organise pour permettre une réponse appropriée
aux problèmes médicaux des patients 24h sur 24h tous les jours de l'année.
·
- La responsabilité de la coordination des soins avec
les différents intervenants sanitaires et sociaux.Le
CRCM a la responsabilité de la coordination de tous les intervenants et
soignants quel que soit le lieu de réalisation des soins. Il doit s'assurer
de la bonne mise en œuvre des décisions qui y ont été prises, de la bonne
complémentarité des actions des différents intervenants au domicile et de
l'adéquation des soins aux attentes et aux capacités des patients et de
leur famille.Dans ce cadre, il assure l'animation
et la coordination du réseau intra régional, régional voire interrégional
qui lui est rattaché. Il élabore, en concertation avec l'ensemble des acteurs,
la convention constitutive du réseau de soins qui doit être agréée par le
directeur de l'ARH et établit un rapport annuel d'activité qui doit pouvoir
être consulté par tous les partenaires. ·
- L'organisation pour les centres pédiatriques, du
transfert dans les meilleures conditions aux équipes d'adultes.Les
centres pédiatriques doivent s'engager à instaurer des liens de collaboration
et de travail privilégiés avec une ou plusieurs équipes d'adultes et inversement.
·
- L'éducation thérapeutique du patient et de sa famille
c'est à dire l'information adaptée au patient et à sa famille sur la maladie
et sur les traitements. Celle-ci est une partie intégrante de la prise en
charge tout comme le soutien aux familles et l'évaluation de leur capacité
à assumer les traitements. Ces éléments de la prise en charge sont aussi
à envisager au domicile et doivent être développés sans exclure des collaborations
extérieures, comme celles venant du milieu associatif ou des réflexions
particulières sur le concept d'infirmière de liaison, capable de se déplacer
au domicile. ·
- La formation pratique des différents intervenants
locaux, en particulier des paramédicaux ( infirmière libérales, kinésithérapeutes….)
·
- La formation initiale et continue des professionnels
de santé concernés. Celle ci peut prendre des formes multiples : participation
à des congrès nationaux et internationaux, publications dans des revues
scientifiques, séances d'information… ·
- Une activité de recherche par l'élaboration ou la
participation à des protocoles de recherche clinique et en soins infirmiers.
·
La mise en place d'une démarche d'évaluation de l'ensemble
de l'organisation. Elle doit être conçue dès la mise en place du réseau
rattaché au CRCM et impliquer tous les acteurs, patients et familles compris.
C) Structure et organisation du CRCM
Il ne peut exister qu'un CRCM pédiatrique et un CRCM
pour patients adultes par site hospitalier volontaire.
L'hôpital qui s'engage à ce titre doit
pouvoir offrir :
- une structure · ouverte toute l'année,
7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.Il peut s'agir
d'une unité fonctionnelle, d'un service ou d'un regroupement de compétences
au sein d'un service. Il n'y a pas de spécialité
obligatoire en dehors de la pédiatrie pour les enfants. ·
- permettant tous les modes de prise en charge : hospitalisation
à temps complet si possible en chambre individuelle, hospitalisation de
jour, consultations ·
- disposant d'un agrément sanitaire MCO ou SSR, publique
ou participant au service public
Les locaux doivent être adaptés en conséquence. En
particulier, toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour éviter
la transmission de germes entre patients.
L'hôpital peut mettre en commun des moyens dédiés à
la prise en charge des enfants et des adultes. une équipe pluridisciplinaire
Elle est composée au minimum des trois
compétences suivantes : médicale, infirmière et kinésithérapeute.
Dans ces 3 domaines, une permanence des réponses doit
être organisée.
C'est pourquoi, il paraît utile de préciser que le CRCM
doit pouvoir faire état au minimum :
- d'un équivalent temps plein médical correspondant
obligatoirement à deux médecins seniors référents pour la mucoviscidose
qui doivent avoir un statut hospitalier temps plein et dont l'un est le
responsable du centre. ·
- d'un équivalent temps plein d' infirmier(e) coordinateur(trice)
dévolu à la mucoviscidose dont il faut souligner le rôle essentiel dans
la coordination des soins et l'accueil des familles. ·
- d' un équivalent temps plein de kinésithérapeute spécialisé.
Les professionnels suivants : diététicienne, psychologue, assistante sociale
jouent un rôle très important dans la prise en charge et leur temps de présence
dans le centre doit être adapté aux besoins et au nombre de patients.
Leur activité indispensable doit pouvoir être facilement
identifiable.
Par ailleurs, le CRCM doit pouvoir faire état de collaborations
précises avec des spécialités diverses : diabétologie, nutrition, ORL, hépatologie
Un généticien clinicien doit assurer les consultations
de conseil génétique des familles des enfants atteints dans le délai que
l'équipe du CRCM juge nécessaire mais aussi celles des hétérozygotes repérés
par le dépistage. Ce généticien clinicien peut ne pas faire partie de l'équipe
pluridisciplinaire du CRCM mais il doit pouvoir être clairement identifié
comme référent par celui-ci.
un plateau technique
Il doit permettre de réaliser les examens suivants
:
Sur place :
D) Le réseau de prise en charge des
patients atteints de mucoviscidose
La formalisation d'un réseau de prise en charge est
indispensable et ne doit pas être qu'un simple exercice d'écriture.
Effectivement, le réseau va conditionner en très grande
partie, la réussite de la prise en charge par sa capacité à coordonner les
différents intervenants. Le réseau peut être intra régional, régional ou
interrégional selon qu'un ou plusieurs CRCM existent dans une région et
souhaitent travailler ensemble.
Le réseau devra distinguer plusieurs lieux et niveaux
de prise en charge : celui du CRCM, celui d'un éventuel centre relais ou
centre de proximité et celui du domicile.
La majorité des traitements auront cependant lieu à
domicile aussi deux types de coordination devront être particulièrement
bien explicités : coordination entre les décisions de CRCM et leur application,
et coordination des différents intervenants sanitaires et sociaux au domicile
du patient.
La place éventuelle des associations de patients, doit
être précisée. Le réseau s'attachera également à réfléchir aux modalités
de mise en place au domicile d'une fonction de vigilance qui pourrait être
assurée par le kinésithérapeute du fait de son passage quasi quotidien auprès
des familles et qui doit permettre d'alerter rapidement, en cas d'aggravation,
l'infirmièr(e) coordinatrice pour éviter d'éventuels retards dans la mise
en place des mesures nécessaires.
Par référence à la circulaire DGS/DAS/DH/DSS/DIRMI n°
99-648 du 25 novembre 1999 relative aux réseaux de soins, le projet de réseau
de soins doit nécessairement comporter, en plus des précisions sur ses objectifs,
son champ d'action et son organisation interne, ·
la liste des différents acteurs,
les références aux protocoles de soins communs et les
règles de bonne pratique que les adhérents s'engagent à respecter, ·
les modalités de la circulation du dossier de soins
et des différentes informations concernant le patient, ·
le fonctionnement de la coordination et de l'animation
du réseau : chaque réseau devra définir s'il confie la coordination au responsable
du CRCM ou à un autre membre du réseau.De même,
les fonctions d'animation et de coordination peuvent être dissociées de
la coordination des soins dans le CRCM. La fonction de coordinateur suppose
d'être l'interlocuteur privilégié des autorités de santé, ARH, DRASS/DDASS,
et URCAM ·
les liens avec l'association régionale de dépistage
(ARDPHE) · les moyens mis en place pour le suivi et l'évaluation du réseau.
Il semble utile de rappeler l'existence du document de l'ANAES publié en
août 99 sur les principes d'évaluation des réseaux de santé, accessible
sur le site internet de l'ANAES (http://www.anaes.fr)
et le guide " credes image " accessible sur le site du CREDES (http://www.credes.fr)
·
les différents moyens dont disposent le réseau et les
cofinancements éventuels
Les modalités de mesure de l'activité du réseau qui
peuvent conditionner certains financements devront faire l'objet d'une discussion
spécifique entre l'établissement auquel il est rattaché et l'ARH. Certains
réseaux pourront comprendre plusieurs établissements et se définiront alors
selon l'article L. 6121-5 du code de la santé publique.
La convention constitutive du réseau selon les termes
de la circulaire DH/EO/97 du 9 avril 1997 relative aux réseaux et aux communautés
d'établissements sera portée à la connaissance de l'ARH qui l'agréera.
Le délai nécessaire à la mise en place complète
d'un réseau ne doit pas être un facteur bloquant pour la désignation du
CRCM et la mise en place du dépistage mais une évaluation doit obligatoirement
être prévue au bout d'un an de fonctionnement pour vérifier la réalité de
cette mise en œuvre.
IV. Modalités de mise en œuvre et
calendrier
A partir de la date de cette circulaire , les ARH avec
l'appui des DRASS et des DDASS ont jusqu'à la fin de l'année 2001 pour faire
parvenir leurs propositions. Celles-ci sont à adresser au bureau O1 de la
DHOS du ministère de la santé, 8 avenue de Ségur 75350 Paris 07 SP. Chaque
dossier comportera : ·